jeudi 19 mars 2015

Semaine 9 : Stratège Koh Lanta contre Chef Scout, les scientifiques de Science of Happiness arbitrent le match !

Un vrai travail d'équipe ! 
 Aujourd’hui, s’ouvre un nouveau grand chapitre de l’art d’être heureux : la coopération, la réconciliation et le pardon.

Probablement avez-vous en tête un moment de votre vie où vous avez été heureux de faire partie d’une équipe ? Avoir son rôle à jouer, vibrer des progrès collectifs, parfois jusqu’à l’exploit : un tournoi de foot remporté, un contrat client décroché, un enfant de nouveau en bonne santé…

Pour les chercheurs de Science of Happiness, coopérer est en effet une attitude clé pour cultiver notre bonheur… et assurer collectivement l’expansion de notre espèce.

Va donc pour la coopération. Mais que viennent faire la réconciliation et le pardon là-dedans ?

Je me dispute, tu te fâches, il est pas d’accord…

Pas facile de s'entendre !
Alors voilà, commençons par un VRAI / FAUX :
  • des frères et sœurs de 4 ans et 2 ans se disputent en moyenne 6 fois par heure
  • les parents entrent en conflit avec leurs chères têtes blondes 6 fois par heure
  • un couple dans une période difficile s’engueule 1h30 par jour

« FAUX bien sûr, c’est tellement ridicule tes chiffres ! Quoique… ma princesse de 3 ans hier a fait un drame à table parce qu’elle voulait absolument son verre rose qui était au sale, elle a refusé de manger ses légumes, a renversé son yaourt par terre, a refusé de se laver les mains, le tout en 20 minutes… D’accord ça arrive les conflits, mais pas 6 fois par heure quand même ? »

Petite voix, tu t’approches de la réalité : tous ces chiffres sont VRAIS ! Le conflit fait partie intégrante de la nature humaine, hélas, y’a pas de débat là-dessus. Animal social oui, mais pas toujours facile de concilier son intérêt personnel avec celui des autres, et quand on n’y arrive pas, c’est le clash !


Je viens de m’engueuler avec mon conjoint, ça c’est fait… la bonne nouvelle c’est que je peux choisir la suite ;-)

Il se trouve que biologiquement, nous sommes tous équipés de 2 circuits pour traiter les conflits. Et la bonne nouvelle, c’est que nous pouvons choisir celui que nous voulons muscler :
  • le circuit 1 : garder le conflit ouvert, se venger, ruminer, éviter l’adversaire
  • ou le circuit 2 : résoudre le conflit, s’excuser, pardonner, coopérer de nouveau
Face aux inévitables conflits, nous pouvons choisir de devenir le stratège de Koh Lanta – qui mène sa barque et envenime la situation – ou le chef scout, qui joue la réconciliation et la coopération entre équipiers.

Petite revue donc, des avantages et limites de chaque stratégie ;-)


La vengeance et la punition du stratège Koh Lanta, une bonne réputation pour des résultats médiocres

Stratège hors pair... mais éliminé !

Du conte de Monte-Cristo à l’affaire Clearstream, les histoires de vengeance ont bercé notre enfance et continuent à accompagner notre quotidien. 

Il faut dire qu’elles ont de l’allure ! Des rebondissements, du suspense, de l’action, des coups bas… de quoi tenir le spectateur en haleine ! 

Mais les protagonistes de l’histoire, comment la vivent-ils ?

Le désir de revanche a, il faut le reconnaître, de bien bonnes raisons d’exister :

  • dissuader de potentiels agresseurs. Si vous vous laissez marcher sur les pieds par Robert à la machine à café sans rien dire ; et que Monique témoin de la scène raconte que vous êtes une carpette, demain c’est peut-être Maurice qui vous écrasera les phalanges
  • dissuader un agresseur de vous faire du mal de nouveau. Faire comprendre à Robert que s’il y revient demain, c’est lui qui finira à l’infirmerie
  • punir les électrons libres qui profitent des efforts collectifs sans y contribuer. Robert qui papotait tranquilou pendant que tout le monde s’affairait au dîner des Amis du Patrimoine est viré de la table des bénévoles, na !

De là à en faire LA tactique parfaite pour naviguer au quotidien loin des écueils, il n’y a qu’un pas. Alors prenons les machiavels et les pros la vengeance. Comment ça se passe pour eux ? Eh bien moyen : socialement, ils réussissent médiocrement, ils sont isolés, très stressés, et peu heureux. Et ce n’est pas un cliché, ce sont eux qui le déclarent !

Notre très grande limite, c’est que nous ne sommes pas une espèce solitaire. Pendant que nous jubilons de notre vengeance, notre cerveau change : c’est notre cerveau reptilien qui prend les commandes et active, même si nous n’en avons pas conscience, des hormones de stress, des sensations de déplaisir, et même de douleur.


La coopération et la réconciliation du chef scout, des outsiders du match qui gagnent à être connues !

Et si on coopérait malgré tout ? 
Tournons-nous maintenant vers la coopération. Vous voyez, le bon chef scout qui fait régner l’esprit collectif, trouve des solutions sages et astucieuses aux conflits ?


Et si ça pouvait marcher dans la vie réelle ?

Suivez le guide pour une expérience extraordinaire des années 80 !

Un tournoi est organisé pour reproduire une jungle des temps modernes : 2 joueurs A et B se voient proposer de coopérer ou de se trahir (dilemme du prisonnier). On joue en plusieurs manches :

  • si A et B coopèrent : ça fait +3 points pour A et +3 pour B
  • si A trahit et B coopère : +5 pour A, +0 pour B
  • si A et B trahissent : +1 chacun
Vous avez tout de suite vu la brèche : quand A trahit un « gentil », c’est le jackpot, +5 dans la poche. Mais à moins que B ne soit trop c… il va vite se mettre à trahir aussi. Donc fini le pays des bisounours coopératifs, où tous gagnent +3 à chaque manche. Bienvenue dans la réalité où tout le monde la joue perso, avec +1 chacun. Notez au passage que le résultat pour la collectivité est moyen : dans la version trahison, c’est +2 distribués à chaque manche, contre +6 dans la coopération.

Donc le tournoi se joue. Et à la stupeur générale, c’est la stratégie de coopération donnant-donnant d’un certain Anatol Rapoport qui l’emporte.

Comment ça, coopérer dans un jeu aussi tordu ?

On se dit que ce n’est pas possible, une 2ème manche est organisée. La stratégie de Rapoport est dévoilée ; ses adversaires ont plusieurs semaines pour élaborer de nouvelles stratégies. On rejoue : Rapoport gagne de nouveau et de très loin !

Vous voulez savoir comment ça marche ?

A la 1ère rencontre, Rapoport coopère systématiquement. Ensuite, il se calque sur son partenaire : coopération –> coopération, trahison –> trahison. Et il PARDONNE systématiquement : tu as trahi, puis tu coopères de nouveau ? Ok je coopère.

Cette stratégie construit la confiance et la coopération, malgré les conflits d’intérêts : les joueurs qui font les meilleurs scores après Rapoport sont ceux qui ont coopéré avec lui ;-)

Et elle a un autre avantage : le cerveau produit 9 fois plus d’hormones de plaisir que dans la stratégie trahison-trahison ;-)


Au programme, la semaine prochaine !

Maintenant que vous avez une idée des avantages de la coopération, je vous propose la semaine prochaine de passer aux travaux pratiques avec des stratégies pour résoudre les conflits : s’excuser sans s’écraser et pardonner sans tendre la joue gauche ;-)

D’ici là, tous vos commentaires sont les bienvenus pour faire vivre et progresser ce blog ! Et si vous préférez, n’hésitez pas à m’écrire par mail ou par Facebook/Messenger.

Que pensez-vous de la définition de la coopération et des conflits proposée cette semaine ? Fait-elle écho à la vôtre ? Adhérez-vous aux avantages de la coopération sur l’envie de revanche ?

Ce blog et ses articles sont ouverts, n’hésitez pas à partager ce que vous y aimez !!


Pour aller plus loin


Une vidéo TED pour faire le plein d’inspiration en 11 minutes, avec une explication limpide de la force de la coopération : Simon Sinek « Why good leaders make you feel safe ».
En lançant la vidéo, vous avez accès aux sous-titres en français en cliquant sur Subtitles / French ;-)

Un titre qui résume tout : « Comment réussir dans un monde d’égoïstes, Théorie du comportement coopératif » par Robert Axelrod, chercheur et organisateur du fameux « dilemme du prisonnier » qui a vu le succès de Rapoport et de la coopération.



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